Rugby : renvoyé de l'Aviron bayonnais, Elissalde est "profondément blessé"
L'ancien consultant de Canal + craint d'avoir perdu « le droit à la critique » en étant écarté de l'Aviron Bayonnais. Il en a été l'entraîneur durant 41 jours.
« On a touché à mon image », regrette Jean-Pierre Elissalde.
Il y a une semaine, l'Aviron Bayonnais relevait Jean-Pierre Elissalde de ses fonctions, 41 jours après lui avoir confié la mission de mener le club au maintien en Top 14. Lui qui a acquis une nouvelle notoriété par sa présence médiatique, notamment sur Canal Plus, se dit blessé.
« Sud Ouest ». Une semaine après votre éviction, quel regard portez-vous sur votre passage à l'Aviron Bayonnais ?
Jean-Pierre Elissalde. J'ai passé 41 jours sur le terrain. J'étais entraîneur, pas manager ni conseiller. Tous les supporters, les joueurs, ont pu se rendre compte de l'animation sur le terrain, de ma volonté de donner, d'échanger. Ces 41 jours m'ont conforté d'abord dans mes appétences, alors que je croyais la flamme disparue, et ensuite dans mes compétences. Car il me semble que sincèrement, j'ai encore quelques qualités d'entraîneur.
Vous êtes-vous senti plus exposé en raison de votre ascension médiatique depuis la Coupe du monde, et « Les Spécialistes » ?
Je suis connu et reconnu pour mon caractère et mon œil critique. Ma façon de ne pas ménager l'ordre établi, les instances. Là j'ai ménagé mon club, la Ligue. J'ai été entraîneur, comme tous mes collègues. J'ai fait en sorte de ne pas tomber dans le côté pleurnicheur. J'ai assumé, justement, nos échecs.
Comment expliquez-vous qu'on ne vous ait pas davantage fait confiance ?
La confiance ne s'achète pas au supermarché. Ça se gagne. Il m'a fallu pendant ces quelques semaines, au staff et à moi, un chômeur (Faugeron), un entraîneur de Fédérale 1 à mi-temps (P.H. Broncan) et un retraité, à chaque instant, aller chercher la confiance de l'équipe. On n'a pas filé des antidépresseurs à tout le monde en disant que les joueurs allaient retrouver le sourire du jour au lendemain. C'était un long cheminement, mais qui me semblait-il, avançait. J'ai été jugé sur un délit de sale gueule, des rapportages, sans doute.
Là où nous avons un devoir de réserve, les uns et les autres, c'est de ne pas toucher à l'homme. C'est bien ce que je me suis gardé de faire dans les interventions sur Canal Plus. Je n'ai jamais égratigné aucun joueur ou entraîneur en tant qu'homme. J'aurais aimé qu'il y ait cette même retenue envers moi.
Je n'ai jamais parlé de l'arbitrage, ni des instances de l'Aviron Bayonnais dans la presse. Je n'ai eu aucun souci avec le staff médical, avec les services administratifs, les joueurs, et mon staff. Les démentis des personnes intéressées, dans la presse, me font dire que je n'ai pas été respecté. En revanche, au niveau des résultats, c'était moins bon qu'avant. Que la décision soit prise de se séparer de moi, c'est la règle. Je l'accepte.
Auriez-vous souhaité avoir plus de temps ?
J'aurais dû en avoir. Mais j'accepte la sanction, c'est un échec. Je pense ne pas avoir fait d'erreur. Peut-être dans ma communication, c'est vrai. Au niveau des résultats c'est un échec. Est-ce que je suis responsable à 100 % ? Chacun le dira, à son niveau. Ceux qui m'aiment diront que je le suis à 2 %, les autres à 98 %.
Avez-vous toujours envie d'entraîner ?
Aujourd'hui, je vais d'abord me défendre, défendre mon intégrité. On a touché fortement à mon image. Que mes compétences d'entraîneur soient remises en cause, c'est la règle du jeu. En revanche, « amiable » n'est pas du tout le mot qui convient à la fin de ma relation avec l'Aviron Bayonnais. Avant j'étais spécialiste, critique. Aujourd'hui ça va être très dur de ramener ma gueule. D'ailleurs, vais-je retrouver un emploi ? N'oublions pas que j'en ai quitté un où j'étais reconnu. On a dit dans la presse spécialisée que j'étais le vainqueur de la Coupe du monde, médiatiquement parlant. Aujourd'hui j'ai perdu cette crédibilité, ce droit à la critique. Non seulement j'ai échoué mais en plus, on a dit que j'étais un sale type. Donc je dois me réhabiliter.
On a touché à votre honneur ?
Je suis un homme public. Quand on me voyait dans la rue, ce n'était pas l'ancien entraîneur, ni l'ancien joueur. C'était « le spécialiste ». Celui qui se « permettait de ». Cette image-là est écornée. Pour beaucoup je serai le vilain petit canard.
Canal Plus vous a rappelé ?
J'ai de très bonne relation avec mes ex-employeurs, mais je me mets à leur place. Redonner aujourd'hui la parole à quelqu'un qui a été jugé, très négativement, sur des critères très subjectifs. J'ai 58 ans, retrouver du travail… (il hausse les épaules).Vous pensez être grillé ?
Vous avez devant vous quelqu'un de profondément blessé, comme je ne l'ai jamais été. Surtout que je n'ai jamais fait acte de candidature pour venir à Bayonne. J'étais très heureux dans ma modeste vie à Baigorri avec mes juniors, avec ce travail de consultant valorisant sur la chaîne du rugby. Je ne demandais rien à personne.
Quels sont vos projets aujourd'hui ?
Aucun. Je vais me battre. Je souffre trop. Je vais mener un combat de réhabilitation. Je suis un type bien, je le répète. Et là, ce n'est pas juste.On en pleurerait presque